Lutte d\'Eos

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L'hospitalisation continue...



Ca va faire 5 mois que je suis à l’hôpital. Les gens viennent, partent, viennent, partent, et moi je reste là. Il arrive qu’on me demande pourquoi je suis arrivée ici, et quand j’en ai la force, je répond que je n’arrivais plus à manger. Alors ils me regardent en se demandant comment c’est possible. Et je réponds « c’est ma tête, ma tête ne voulait plus que je mange. » En fait, moi aussi je me demande comment c’est possible de tomber aussi bas. Comment une obsession peut prendre le pas sur la raison, comment on peut se voir mourir et ne pas se remettre sur pieds, pour une question de balance. Je me souviens bien de cet enfer que je menais chaque jour. Prendre une craquotte pour le déjeuner, la couper en deux pour être certaine de ne pas manger l’autre moitié. Puis la couper à nouveau car une demi craquotte, c’est trop. Mordre un bout, le recracher, et tout jeter à la poubelle. Alors je me suis mise au café. J’ai toujours adoré manger et boire. Je me suis donc mise à boire du café à longueur de journée. Pour me remplir de quelque chose. Jusqu’au jour où j’ai compris que le liquide faisait monter le poids qu’indiquait la balance. Du poids fictif, vite évacué, mais du poids quand même. Alors j’ai pris peur des boissons. Je me nourrissais d’un café le matin et un thé le soir. Et puis plus rien. Plus de nourriture, plus de boisson, la seule gorgée que j’arrivais à boire était une gorgée de trop. Une gorgée que j’aurais pu éviter. Le soir, si je n’avais pas le ventre vide, je prenais un couteau et écorchait ce corps squelettique. Squelettique mais trop gros, constamment trop gros et trop lourd. Un matin je suis descendue de ma chambre, ma mère était là et avait posé une pâtisserie de noël sur ma place à table… Comme si j’allais la manger. Ensuite elle m’a dit qu’ils avaient pris une décision elle et mon père : ils allaient m’emmener aux urgences. L’hôpital est au bout de ma rue, j’y vais à pieds. Enfin, j’essaie. Mes jambes avaient du mal à marcher, le geste ne se faisait plus naturellement. Aux urgences ils m’ont pesée, impossible de connaître le poids qu’indiquait leur balance. Ils m’ont laissée dans la chambre, prises de sang, etc, ils m’ont tendu un yaourt : je n’en voulais pas. Ils ont contacté un autre hôpital, j’allais y être hospitalisée, il fallait me transférer d’urgence. Bientôt. Le lendemain, j’étais invitée à un repas chez ma sœur, je me suis dis « mais enfin, reprends toi, tu peux manger comme tout le monde, juste un peu de chose saine, ce n’est pas grave. » Alors j’ai mangé. Ses plats étaient délicieux, j’ai finis mon assiette, puis j’ai finis les plats. De peur de continuer à manger chez moi je me suis remplie de toutes les boissons possibles… Je suis rentrée chez moi. J’ai vidé le frigo. Vidé la cave. À quoi s’aurait pu servir de s’arrêter ? J’avais craqué, j’étais une grosse incapable, autant craquer jusqu’au bout. Puis je me suis retrouvée à terre, à crier de douleur, autant physique que mentale. Ma mère m’a transportée jusqu’à mon lit, je me suis vomi dessus. Ca, c’était une semaine avant qu’on m’emmène à l’hôpital. À 31kilos, 31 kilos de trop. J’ai passé Noël ici, puis le nouvel an, mon anniversaire, les vacances de carnaval, les vacances de pâcques, le voyage rétho qui a décolé sans moi, le début de l’été qui commence et je suis toujours enfermée dans ce maudit hôpital. Maladie de merde, enfer maudit, je me bat tous les jours. Je me suis battue des années dans la maladie, maintenant je me bat pour en sortir, et je finirai par me battre pour ne pas retomber…

 

 

J'ai envie de me battre contre cette ode à la maigreur.

Ces idéaux faussés. Ce monde qui nous rend malade.

Honte à ce monde.

 

 

 





04/05/2013
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